Abbaye Saint-Michel-de-Cuxa

Une des plus anciennes et importantes abbayes des Pyrénées-Orientales.

Tout le monde connaît Saint-Michel-de-Cuxa dans la région, mais aller sur place découvrir sa crypte est une expérience bien plus marquante que de se contenter d’admirer sa splendide silhouette de loin !

Une magnifique abbaye à découvrir, pour qui ne l’a pas encore visitée.

Tout le monde connaît Saint-Michel-de-Cuxa dans la région, mais aller sur place découvrir sa crypte est une expérience bien plus marquante que de se contenter d’admirer sa splendide silhouette de loin !

Une magnifique abbaye à découvrir, pour qui ne l’a pas encore visitée.


De quoi s'agit-il ?



L'abbaye Saint-Michel de Cuxa est probablement la plus connue des abbayes des Pyrénées-Orientales. C'est une abbaye construite au IXe siècle, dont l'essor fut retentissant durant les siècles suivants, à tel point qu'elle devint un centre d'échanges, de connaissances et de décisions de grande importance : on venait de toute l'Europe pour rencontrer les personnalités importantes de la chrétienté, et la diffusion de son savoir se répandit rapidement.

De nos jours, cette abbaye est parfaitement conservée. Elle se trouve à Codalet, un village jouxtant Prades. Elle est située au sud de la ville, le long de la route, et il est impossible de la rater. Elle se compose d'une très belle église abbatiale, d'un clocher célèbre dans toute la région pour sa beauté et ses proportions, ainsi que de plusieurs bâtiments conventuels. L'abbaye possède une seconde église sous la première, avec une particularité : un pilier central dont le sommet forme une voûte, une architecture complexe réalisée par des artisans ne maîtrisant pas les techniques modernes de construction. L'abbaye a également conservé son cloître, dont les chapiteaux de colonnes sont magnifiques.


Bien sûr, l'abbaye se visite et elle est particulièrement intéressante.


Histoire

Origine

C'est en 846, soit cinquante ans après la création de l'abbaye de Sainte-Marie d'Arles, que sept prêtres et quelques laïcs arrivèrent sur la plaine de la Llitera, petite rivière descendant du Canigou et traversant Taurinya. Ils s'y installèrent sur ce lieu désertique appelé Exalada pour y mener une vie monastique et y bâtir un monastère dédié à Saint-André.

Malheureusement pour eux, un glissement de terrain eut raison de l'édifice trente ans plus tard. Les survivants de la catastrophe s'installèrent provisoirement dans la chapelle de Saint-Martin de Clara, sur les pentes du Canigou.

Un certain Protasius possédait non loin de là, dans la vallée du Cuxa, un alleu sur lequel s'élevait un très modeste oratoire dédié à Saint-Germain. C'est là que les moines s'installèrent définitivement. Les premiers travaux consistaient à élever un sanctuaire en grosses pierres roulées et en argile. Leur emplacement n'était pas très loin du "palais" des comtes de Cerdagne, dont dépendait l'alleu. Ceux-ci leur firent don de nombreuses terres et de bénéfices, ce qui permit à l'abbaye de progresser rapidement.

Au Xe siècle, il y avait déjà 50 moines et 20 serviteurs. Les terres aux alentours étaient cultivées et plusieurs troupeaux de vaches et de brebis faisaient vivre la communauté. En 879, l'abbé Protasius, probablement le fondateur, mourut. La bibliothèque du lieu religieux contenait 30 livres seulement, ce qui était à l'époque assez extraordinaire.

L'abbaye reçut la visite du doge de Venise, Pierre Orséolo, de Romuald, fondateur de l'ordre des Camaldules, et de Gerbert d'Aurillac, futur pape. L'église Saint-Germain fut reconstruite et consacrée en 953. L'oratoire consacré à Saint-Michel, qui donna finalement son nom au monastère, fut agrandi et consacré en 975. Cette église fut largement agrandie et embellie au XIe siècle par l'abbé Oliba ; le grand cloître fut élevé au XIIe siècle.


Expansion

Deux abbés furent les fers de lance de Saint-Michel. Le premier était Guarin, dans le premier quart du Xe siècle, et l'autre Oliba, dans la première moitié du XIe siècle. Guarin était non seulement abbé de Saint-Michel de Cuxa, mais également de trois autres abbayes et de deux prieurés situés en bas Languedoc. Son importance était telle que les rois carolingiens lui demandèrent de visiter les monastères bénédictins en Terre Sainte. Ce rayonnement attira de nombreuses personnes à l'abbaye. L'église abbatiale devint alors trop petite, et Guarin fit construire une église plus grande en 974 avec l'aide de la famille comtale de Cerdagne. À cette époque, le comte Séniofred cherchait à accomplir des œuvres méritoires pour le salut de son âme. Il décida donc de faire agrandir cette église "pour le repos du comte Miron et afin que sa mère Ava, son frère Oliba et lui-même, comte de Cerdagne, jouissent d'une bonne santé, obtiennent la rémission de leurs péchés et soient un jour assis dans la gloire du royaume des cieux" (acte de consécration de la nouvelle église, dédiée à Saint-Michel). Ce jour-là, les évêques d'Elne, de Vich, de Gérone, d'Urgel, de Couserans, de Carcassonne et de Toulouse étaient présents, témoignant de l'importance de Guarin.

Durant la première moitié du XIe siècle, l'abbé Oliba prit la relève. Fils du comte de Cerdagne, Oliba avait hérité de son père le Conflent. En tant que nouveau comte, il devint également abbé. Ses vœux monacaux furent prononcés à Sainte-Marie de Ripoll en 1002. Il y resta le temps nécessaire à sa formation sur les Saintes Écritures, puis, en 1008, il fut nommé abbé de Sainte-Marie de Ripoll et de Saint-Michel de Cuxa, fonctions qu'il conserva jusqu'à sa mort. En 1018, il fut également nommé évêque de Vich.

Oliba entreprit plusieurs modifications des bâtiments. Il ajouta deux tours (dont une seule subsiste aujourd'hui), orna l'église et fit construire l'étonnante église souterraine Notre-Dame de la Crèche. Mais son œuvre principale fut l'organisation du synode de Toulouges, dont les effets furent bénéfiques pour réduire les guerres intestines dans la région.


Les Seigneuries dépendantes de St Michel

L'abbaye s'est rapidement dotée de nombreuses seigneuries grâce à la générosité des comtes de Cerdagne. Ces seigneuries avaient pour taches de fournir à la communauté de moines tout ce dont ils avaient besoin pour survivre. En échange les moines leurs apportaient la reconnaissance spirituelle et la sécurité.

Les possessions de l'abbaye durant le XIe siècle étaient gigantesques. En Cerdagne, elle dirigeait les paroisses des Angles, de la Llagonne, de Prats-Balaguer, de St Pierre del Forcats. Dans le Conflent, c'était Fuilla, Baillestavy, Serdinya, Campoussy, Vernet, Ria, Sirach, Sahorre, Py. En Roussillon, St Féliu, Millas, Thuir, Ille sur Têt, Baho. Elle avait également la paroisse de Valmanya, qui restera une de ses possessions jusqu'à la Révolution Française (D'ailleurs le blason de Valmanya arborre la crosse abbatiale).


L'Abbaye à l'épreuve du temps

Mais revenons à l'histoire de l'abbaye. En 1009 Selva, un moine, fut choisi pour diriger les travaux d'une autre abbaye, St Martin du Canigou, dont il deviendra le premier abbé.

Au XIIe siècle le monastère se dota d'un cloître. Il fut créé par l'abbé Grégoire. Le 15 mai 1252 un acte passé devant notaire indique que l'abbaye possédait sur ses terres un hôpital, lieu d'asile pour les malades. Lors de l'épisode de la reprise du royaume de Majorque, Pierre IV le cérémonieux, roi d'Aragon, écrivit :

Nous vînmes en ce jour au monastère de St Michel de Cuxa, à une demi-lieue de Villefranche de Conflent et nous y séjournâmes quatorze jours. Nous fîmes démolir les remparts et les tours que jacques de Montpellier (jacques II de Majorque) avait établis là. Nous fîmes également abattre les fortifications de Codalet, Prades et Marquixanes.

Cinq ans après, l'abbé Raymond relève la tour de défense de l'abbaye et les murailles de Codalet. En 1382 Galcerand de Descatllar est abbé. Il eut à faire face à une fronde de la population provoquée par le viguier de Villefranche de Conflent dont l'origine semblerait remonter à une division au sein même de la communauté monastique. Toujours est-il que l'abbé se plaignit au roi que les portes de l'église avaient été forcées par une foule nombreuse conduite par Arnald de Banyuls, le viguier.

L'abbé et plusieurs religieux furent arrêtés et emprisonnés à Villefranche. Jean 1er d'Aragon prit fait et cause pour l'abbé et écrivit à Arnald : "Ma démarche contre vous est profondément justifiée car les motifs dont vous vous êtes servi pour incriminer l'abbé sont injustifiés et de pure invention. L'abbé était parfaitement dans son droit lorsqu'il a infligé des peines méritées à tel ou tel de ses religieux. Un contrat signé de part et d'autre l'autorisait, le cas échéant, à faire exécuter ses peines."

La suite du texte ordonnait la libération des prisonniers et un avertissement contre Arnald pour le cas où cet évènement se reproduirait.

Moins de cent ans plus tard le siège de l'abbé est resté vacant pendant cinq ans. On songea même à unir St Martin du Canigou, pourtant issu de St Michel, à l'abbaye. En 1561 Louis de Cagarriga était abbé de St Michel de Cuxa. Le monastère possédait à cette époque une relique de la Ste Croix de 10 cm, ce qui en faisait un morceau trop gros pour ne pas être suspect. Vu que l'on était en plein protestantisme et que les adeptes de ce courant religieux supprimaient le culte des reliques, l'abbé imposa que l'on brûle la relique. La légende raconte que le morceau de bois fut retrouvé intact au milieu des cendres.

Le successeur de Louis de Cagarriga fut un religieux qui n'eut que le titre de prieur claustral, puis ce fut Bernard de Cardonna, l'évêque de Vich. Il s'attacha à embellir l'église auquel il ajoutera en particulier un autel fait en marbre de Villefranche qui resta à sa place jusqu'à la révolution. Son successeur fut Dom Pierre Puigmari y Fumez, qui administra tranquillement la vie monastique et civile de Codalet.


Prise du Roussillon par la France

A la signature du traité des Pyrénées en 1659, le Roussillon devient français. L'abbaye de St Michel change d'abbé en la personne de Joseph de Trobat, fidèle du roi de France ayant participé activement à la rédaction du traité. Son frère était Raymond de Trobat, intendant du Roussillon et membre du conseil souverain. Autant dire qu'à eux deux, ils détenaient le pouvoir temporel et spirituel de la région.

Mais Joseph n'était pas un ecclésiastique. Il se fit élire abbé en moins d'une heure, la cérémonie lui permettant de postuler à l'habit bénédictin, de commencer et terminer son noviciat puis de recevoir la bénédiction abbatiale. Ce qu'un moine met des années à accomplir !

Vu comme ça, la vie monastique n'avait plus de sens. L'abbé s'en désintéressait et bientôt on vit les moines s'isoler dans des bâtiments à part, chacun ayant une vie autonome n'ayant plus aucun rapport avec le but premier de l'abbaye.


Déchéance de l'abbaye

La chute vint en 1768. Un édit royal et une bulle du pape Clément XIV ordonnent l'abolition des bénéfices dans l'ordre bénédictins en même temps que le retour à la vie communautaire. Mais les moines étaient trop habitués à leur confort personnel. L'abbé tenta de faire appliquer cette décision mais il ne put venir à bout des réticences.

Le 4 août 1789 l'Assemblée Nationale décrète l'abolition de tous les privilèges et bénéfices. La plupart des moines de St Michel ne veulent pas revenir à la vie monacale, il s'éparpillent dans la vie civile. Le 23 février 1790 l'Assemblée supprime les ordres monastiques. Autour de l'abbé, il n'y a plus que 7 religieux. Le 29 avril les officiers municipaux de Codalet viennent faire l'inventaire des biens et meubles de l'abbaye. Tout ce qui est recensé sera dispersé, y compris les précieuses archives et disparaîtront définitivement.

Quelques mois plus tard, l'abbé décède, il est remplacé par un parent de Trobat, Dom Joseph de Trobat, un vrai moine et noble de surcroît. Il résiste tant bien que mal à la dispersion des biens de son abbaye, mais quand les révolutionnaires forcent les portes le 27 janvier 1793, il est seul, les derniers moines étant partis définitivement. Chassé, ce sera le premier jour depuis 1000 ans sans prière dans l'abbaye.

Peu à peu les édifices, abandonnées, tombent en ruine. seule l'église et la maison abbatiale restent encore debout. De nombreuses pièces architecturales sont amenées ailleurs (chapiteau de colonnes à Prades, la grande vasque de marbre qui était au centre du cloître est maintenant à Eze, près de Nice, et les plus belles pièces sont aux musées des cloîtres, à New-York).

En 1830 la foudre s'abattit sur une des deux tours qui s'écroula. La voûte de l'église s'effondra, l'église souterraine se remplit de gravats.


Renouveau de l'abbaye

Au début du XXe siècle, l'évêque de Perpignan monseigneur Carsalade du Pont décida de faire revivre l'abbaye. Il y parviendra à force de tenter de convaincre les habitants, les ordres religieux mais surtout les autorités locales. En 1907 une partie du cloître est acheté par un riche américain, George Grey Barnard. Le Métropolitan Museum de New-York le récupère et fait ériger le cloître sur les berges de l'Hudson. Le 7 mai 1919 des moines originaires d'Espagne arrivèrent à Cuxa pour faire revivre la communauté religieuse. Ce sont des Cisterciens, ils y sont toujours de nos jours.

L'abbaye a été prise en charge par les Monuments historiques après la guerre.


Cartes postales anciennes

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Situation et accès

L'abbaye Saint-Michel-de-Cuxa se situe à Codalet, au sud de Prades. Pour vous y rendre, prenez la Nationale 116 depuis Perpignan en direction de Prades. À la sortie de Prades, une route part sur la gauche en direction de Codalet. Traversez le village, et vous trouverez des panneaux directionnels indiquant le chemin à suivre. L’abbaye est incontournable : elle est située directement à proximité de la route, impossible de la manquer.



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