Le traité de Bayonne

C'est alors que Jean II se tourne vers la France à la recherche d'alliés pour réprimer la rébellion catalane. Il trouve un soutien auprès du roi de France, Louis XI. Le traité de Bayonne, signé le 9 mai 1462, accorde à la France la récupération des revenus du Roussillon, du Conflent et de la Cerdagne en échange d'un prêt de 30 000 florins.

Grâce à cet accord, la France envoie une armée pour assiéger Barcelone. Le 10 juillet 1462, l'armée traverse le Roussillon sous le commandement de Gaston IV, comte de Foix et gendre de Jean II. Le siège dure du 8 septembre au 3 octobre, mais il prend fin brutalement grâce à l'intervention d'une seconde armée, celle d'Henri IV de Castille, voisin du royaume d'Aragon et allié temporaire des Catalans.

En signe de reconnaissance, les Catalans nomment Henri IV de Castille roi de Catalogne. Louis XI se venge de cette défaite en occupant militairement la Catalogne Nord. Le Roussillon passe ainsi sous domination française. Toutefois, pour les Catalans, la situation se complique rapidement lorsqu'ils entrent en conflit avec le royaume de Castille. Ils cherchent alors un nouveau roi et le trouvent en Pierre IV du Portugal, époux d'Isabelle, l'une des filles du comte d'Urgell. Pierre IV arrive à Barcelone le 21 juin 1464, mais meurt le 29 juin 1466, épuisé. Le roi suivant fut René d'Anjou, comte de Provence et oncle de Louis XI, ce qui lui permet de faire rompre le traité de Bayonne.

Pendant ce temps, Jean II poursuit sa conquête de la Catalogne, toujours en rébellion. Au fil des années, les villes se soumettent progressivement à son autorité, jusqu'au 17 octobre 1472, date à laquelle Barcelone, la dernière d'entre elles, ouvre ses portes. Les négociations furent longues, mais le roi promit de respecter les Catalans et obligea son héritier à faire de même. En 1472, Jean II, devenu un vieillard fragile, voit son autorité restaurée.

Revenons cependant à l'occupation française des comtés du Roussillon et de la Cerdagne, de 1462 à 1472. Rapidement, ces territoires furent administrés selon le modèle français. La famille Oms se distingue alors : Carles fut nommé commandant en chef de Perpignan, Bernat gouverneur de la province et Bérenguer commandant du château de Collioure. La répression fut sévère, car les Roussillonnais, toujours opposés à l'accord entre l'Aragon et la France, résistèrent activement. Les troupes françaises eurent du mal à surveiller la région récemment acquise contre les envahisseurs extérieurs, tout en faisant face à la résistance de la population locale. Ainsi, les canons installés sur les remparts de Perpignan étaient orientés vers l'extérieur le jour et vers l'intérieur de la ville la nuit !

En 1472, après la soumission de Barcelone, Jean II chercha à récupérer le Roussillon, mais sans succès.

Le Roussillon, objet de tractations franco-aragonaises

En 1472, Jean II obtient la soumission de Barcelone. La Catalogne revient sous le contrôle de l'Aragon, mais l'opposition entre les deux parties ne s'achève pas pour autant. En 1474, à la suite de la mort du roi de Castille, Henri IV, une guerre de succession éclate entre l'infante Jeanne, soutenue par la France et le Portugal, et l'infante Isabelle, fille de Ferdinand, héritier du royaume d'Aragon, elle-même soutenue par Jean II. Pour obtenir l'appui de la France, le roi d'Aragon utilise alors le Roussillon et la Cerdagne comme monnaie d'échange. Le résultat de cette stratégie : l'infante Isabelle monte sur le trône de Castille, et ces deux comtés sont une nouvelle fois cédés à la France le 10 mars 1475.

Fort de cette expérience, le roi de France, Charles VIII, s'emploie à réduire la population de Perpignan. Une importante vague d'émigration du Roussillon vers Barcelone se produit, en raison des mauvais traitements infligés aux habitants durant cette période. Les fortifications de Perpignan sont restaurées et modernisées pour renforcer la position de la France dans cette région.

Jean II décède en 1479. Son fils, Ferdinand II dit "le Catholique", lui succède. Il épouse Isabelle de Castille. Pour la première fois, l'Aragon et la Castille sont unis au sein d'un même couple royal, posant les bases de l'Espagne moderne. Cependant, ces bases restent fragiles, car la population aragonaise ne voit en Isabelle que l'épouse de leur roi, et la population castillane considère Ferdinand II uniquement comme l'époux de leur reine.

Quelques années plus tard, en 1493, Charles VIII, roi de France, décide de se débarrasser du Roussillon et de la Cerdagne, sous l'effet de diverses pressions. Cette décision vise d'une part à afficher une forte amitié entre la France et l'Aragon, et d'autre part à libérer des ressources pour les ambitions du roi de France en Italie. En effet, les habitants du Roussillon, toujours opposés à la France, se révoltent fréquemment contre les autorités françaises, et Charles VIII désire pouvoir concentrer ses forces pour ses conquêtes italiennes. C'est donc avec satisfaction qu'il cède ces terres encombrantes.

Le Traité de Barcelone

La restitution des terres du nord de la Catalogne à l'Espagne fut formalisée par la signature du traité de Barcelone, le 19 janvier 1493. Six mois plus tard, le 13 juillet 1493, Ferdinand II et la reine Isabelle de Castille entrent à Perpignan, acclamés par la population. Les Perpignanais se croyaient alors libérés du joug des oppresseurs, mais ils déchanteront rapidement. Ils durent faire face à l'oppression aragonaise, car un système de gouvernement centralisé fut instauré, ne laissant aucune place aux traditions politiques de la Catalogne. Toutefois, bien qu'il n'y ait pas eu de révoltes majeures comme dans le passé, un sentiment d'oppression persista parmi la population.

En 1496, Charles VIII de France attaqua à nouveau le Roussillon. Son armée mit à sac Salses avant de se retirer dans les Corbières. Cette incursion poussa le roi d'Aragon à renforcer la protection de la frontière nord de son royaume, en verrouillant le seul passage praticable entre les marais et les collines, à Salses. C'est ainsi qu'en 1497, la construction du Château de Salses débuta.

Alors que la citadelle était encore en construction, Louis XII de France tenta de s'en emparer en 1502, mais échoua. Ferdinand II en profita pour restructurer les défenses de la région, notamment en renforçant les murailles de Perpignan et en fortifiant la citadelle de Collioure.

La suite de l'histoire du Roussillon concerne la Renaissance.