Histoire
L'histoire de Mont-Louis est très récente. Basée sur l'ancien village d'Ovança qui a disparu de nos jours, la ville s
'est développée autour de la citadelle. Voici comme s'est monté Mont-Louis.
Le Choix du Site
C'est le tracé de la nouvelle frontière franco-espagnole suite au traité de 1659 qui incite Louis XIV à organiser la défense du Sud. Sébastien
Le Preste de Vauban est nommé le 4 janvier 1678 commissaire général des fortifications. Il est
chargé par le roi Louis XIV de fortifier la frontière française. Après son premier voyage en Roussillon en 1669 Vauban revient 10 ans plus tard et
choisit l'emplacement de Bellegarde, Amélie les bains,
Prades, Villefranche. Il parcourt ensuite la
Cerdagne où une place forte est indispensable pour contrôler la ville de Puigcerda, l'accès en
Ariège et vers Perpignan. Six emplacements sont examinés et cinq en sont exclus.
- Le tertre de la plain de Medes au dessus de Puigcerda : Sans eau, commandé par les hauteurs environnantes et sous les canons de Puigcerda.
- La vallée de Carol : Peu peuplée et pauvre.
- Les hauteurs nord de Saillagouse : Trop petites et commandées par des monts plus élevés.
- La région du col de la Perche : Sans eau et ne permettant pas d'être maître des défilés (Vallée de la Têt et du Capcir)
- La Llagonne : Trop enneigée dominée alentour, trop éloignée de la Têt et de la Cerdagne.
Vauban trouve alors la situation idéale au dessus du Villard d'Ovança (il n'en reste aujourd'hui que la ruine d'une tour) le site choisi abritera
dès lors la nouvelle forteresse : Mont Louis.
Selon Vauban,
Les rochers, torrents environnants, les mouillères, les fontaines du col de la perche en formant des fossés naturels
d'autant mieux que ces rivières étreignent des pièces de rocher gros comme des carrosses". De plus la place Mont-Louis
situé juste à proximité du Villard d'Ovança aura l'avantage d'avoir la main d'œuvre, pacage, moulins, bois et cultures
à proximité. "De toutes les places que j'ay vue qui sont en assez belle quantité je n'en connais point dont la circonvolution
soit si difficile ni moins praticable".
La Construction de la ville
Après avoir choisi le site, Vauban trace les plans d'une citadelle divisée en trois parties.
- La citadelle : occupée aujourd'hui par le Centre National d'Entraînement Commando.
- La ville haute : Zone civile de nos jours, elle devait abriter les logements de la petite bourgeoisie, artisans, gens de métiers, et les casernes d'infanterie.
- La ville basse : Non réalisée elle aurait du s'étendre sur l'actuelle RN116 il y aurait eu les vivandiers, les magasins à fourrage et les écuries.
C'est le 2 mai 1679 que Vauban rédige et expédie l'instruction générale du projet, ce document organise le travail, les devis des travaux prévus,
le nombre et le type d'outils à réaliser... En même temps est préparé un camp pour 1800 à 2000 hommes de pieds qui effectueront les travaux de
terrassements. Au final dans la partie militaire seront réalisés la chapelle, l'arsenal, 2 magasins à poudre, la maison du lieutenant du roi. Il
manquera à Mont-Louis la maison du gouverneur, le logement des aumôniers et la halle prévue au milieu de la place. Le devis total pour la
construction des 3 zones est de 260 898 livres. Le 25 février 1679 le roi apporte protection et droit de franchise à tous ceux qui voudraient
apporter les denrées nécessaires à la vie dans les places fortes et citadelles de sa majesté. De ce fait les civils ont le droit de se loger
dans la ville haute, l'activité commerciale augmente grâce au droit de franchise. Les voituriers font de Mont-Louis une halte commode pour le
commerce de contrebande. Mont-Louis se peuple donc d'une population hétéroclite qui apprend le catalan par nécessité, mais garde en souvenir sa
langue natale.
C'est le 26 octobre 1681 que seront remises les clefs de Mont-Louis à Mr Durban de Fortin premier gouverneur de la cité. Il aura donc fallu
10 à 12 mois de travaux effectifs pour réaliser le gros oeuvre du projet de Vauban (pendant l'hiver
1681 et 1682 et l'été 1682 ont été poursuivis les travaux d'excavation)
Mont-Louis après Vauban (de 1689 à 1774)
Voyons tout d'abord ce qui se passe sur le plan militaire. C'est en 1689 que Mont-Louis joue un rôle déterminant. En effet, le duc de Noaille
s'installe à Mont-Louis et détache l'Adjudant Général Chazeron sur Prats-de-Mollo. A partir de cette date 9 campagnes ouvrent à la France les
principales places fortes de Catalogne. La chute de Barcelone est la cause déterminante de la paix de Ryswick (1697).
Bien que Mr Durban remette en cause le site choisi (Il va jusqu'à demander la destruction de la citadelle au profit d'une autre reconstruite
sur la plaine de Medes), la ville s'achève. Au 13 janvier 1700 la capacité de la citadelle est de 48 chambres d'officiers 176 pour les soldats
pouvant contenir chacune 5 lits (880 personnes), en 24h peuvent se cuire 2400 rations de pain et se tirer 6500 pots de camp d'eau. Mr Joblot
(fidèle de Vauban) propose de bâtir les logements qui manquent encore (celui du gouverneur, des aides major, des officiers et la fameuse halle
prévue par Vauban). En 1718 Dugazel fait l'inventaire des armes :
Il y a 43 pièces de canons, tous de fonte, composées de :
- De livres de balle à l'ordinaire : 4
- De 16 à l'ordinaire : 4
- De nouvelles inventions : 2
- Obus : 2
- De 12 à l'ordinaire : 5
- De 10 à l'ordinaire : 2
- De 8 courts : 8
- De 6 courts : 2
- De 4 à l'ordinaire : 6
- De 3 à l'ordinaire : 7
- De 2 livres de 1/2 obus : 1
Armes
- Arquebuses à crocs : 19
- Mousquets biscayens : 1160
- Faux : 98
- Mousquets biscayens à l'espanole : 50
- Hallebardes : 72
- Pertuisanes : 29
- Spontons : 34
- Piques : 11
- Canons à biscayens : 400
- Canons à mousquets à l'ordinaire : 601
Les puits peuvent fournir de l'eau à plus de 1500 habitants, les fours ont été portés au nombre de 6 et peuvent cuire 10000 rations de pain par
jour les casernes contiennent 1500 hommes et leurs officiers et les écuries 300 chevaux. On remarquera dans les années 1720-1740 une certaine
décadence sur le plan militaire. En effet la construction de Mont-Louis s'achève et à cette période la ville connaît un nouveau style de présence
militaire. Les régiments effectuent un circuit à travers le Roussillon, allant de Mont-Louis à Collioure par
Villefranche, Perpignan et Bellegarde. Dans cette période c'est l'hôpital qui connaît la plus grande
activité, passant de 3 à 12 malades par jour. La place sert aussi de prison car le nombre de déserteurs est grand (Une somme de 200 à 300 livres
par homme capturé était versée aux paysans).
En 1774 de nouvelles missions sont confiées à Mont-Louis, ce qui relance l'activité de la cité : Couvrir Villefranche, Servir de dépôt à une
armée qui voudrait se rendre en Espagne, être une base d'opérations.
En ce qui concerne la vie quotidienne...
Mr Dugazel dans son inventaire nous donne aussi de précieux renseignements sur la ville et sa population en 1718. "50 maisons dont 5 seulement
sont bâties solidement avec de bonnes pierres et couvertes d'ardoises, mais le reste est composé de baraques élevées pour la plupart avec des
assemblages de charpentes revêtues et couvertes de planches de sapin. Il y a 231 habitants de tout âge et de tout sexe parmi lesquels 44 chefs
de famille et 50 propres à porter les armes. Les habitants de cette ville sont presque tous originaires de France, quelques uns de Cerdagne et
un peu du Roussillon, ils sont tous marchands, cabaretiers ou ouvriers. Il y a 3 de ces marchands dont on peut tirer un grand secours dans une
occasion par les magasins de grains qu'ils tirent de la Cerdagne Espagnole et française avec laquelle ils ont un commerce considérable. Leur
caractère est d'être très attaché aux intérêts de la patrie et aussi bon français que le peuple qui habite dans le cœur de la France."
Voici la liste des métiers :
Métiers |
Maîtres |
Garçons |
Serruriers |
2 |
0 |
Charpentiers |
5 |
0 |
Maçons |
5 |
0 |
Chaudronniers |
2 |
2 |
Boulangers |
2 |
0 |
Tailleurs |
1 |
1 |
Marchands |
7 |
4 |
Enfin, l'hôpital peut recevoir 100 malades.
Lors de la construction de la citadelle de nombreux baraquements en bois sont construits en dépit de règles laissées par Vauban. Mr Durban ne fait
rien pour contrôler les constructions ultérieures et Joblot, ingénieur en chef du Roussillon fidèle de Vauban, se heurte à un problème d'urbanisme. En
1721 le chevalier Olive (nouveau commandant de Mont-Louis) souhaite qu'un plan de Mont-Louis soit établi pour démontrer les fautes de Durban. Joblot
en profite pour soumettre au chevalier Olive le plan d'urbanisme créé par Vauban en 1679 selon lequel la construction des maisons obéit à un cahier
des charges précis : La décoration des maisons égales entre elles... "Les boutiques, les portes d'entrées et les fenêtres seront bâties de pierre de
taille..." Le 4 novembre 1727 le roi ordonne que "les particuliers qui voudront faire bastir des maisons dans la ville de Mont-Louis (...) seront
tenus de les faire construire (...) et de prendre préalablement des alignements (...) conformément au plan général établi par Vauban."
La ville sera désormais dotée d'un ensemble de rues formant un damier et d'une église dans la partie civile, demandée par une délibération du
consulat (conseil municipal de l'époque) en date du 11 avril 1732. Le mobilier de l'église est pauvre et son paiement figure au compte de l'extraordinaire
des guerres de 1737 pour la somme de 6287 livres 6 sols et 9 deniers.
Après la révolution de 1789 Mont-Louis devient Mont-Libre et joue un rôle essentiel dans la guerre déclarée entre Charles IV d'Espagne et la France
(du 17 avril 1793 au 18 septembre 1794) Durant cette guerre, le général Dagobert meurt à Puigcerda et il est enterré sous la place principale de
Mont-Louis, au "tombeau Dagobert". Consultez le dossier sur la guerre de 1794 pour plus d'informations.
De Napoléon 1er à nos jours
La capitaine Menpde du Corps Impérial du Génie inaugure la période impériale par un bilan complet sur l'état des frontières franco-espagnole. En
ce qui concerne la ville il préconise la construction d'une redoute au dessus de Bolquère et une au dessus du Villard d'Ovança. Selon lui il faut
raser les étages supérieurs des bâtiments pour ne conserver que les parties voûtées à l'épreuve des bombes. Il arrête la garnison à 2000 hommes.
A partir de 1808 Mont-Louis devient un vaste camp de passage pour l'armée d'Espagne. En 1812 elle rassemble les provisions de siège. En 1824 un
inventaire du rôle logistique est fait : 350 000 Kg de grains de farine, 160 000 litres de liquide, 15 800 Kg de salaisons, 2 500 stères de bois
de chauffage, 12 600 Kg de paille, 100 000 Kg de poudre et 44 000 litres d'eau. En 1830 le capitaine Lelas évalue la garnison nécessaire en cas
de blocus à 1500 hommes et en cas de siège à 3500 ou 4000 hommes. Le magasin permet de stocker 4 mois de vivres et 6 mois de liquides.
En 1835 le capitaine Ribot commandant du génie préconise la démolition du 2e étage des casernes pour améliorer la défense et veut faire construire
ailleurs une contrepartie. En 1887 les travaux envisagés commencent, un ouvrage est fermé avec abri est construit au pic de la Tausse l'armement du
pic de Figuema est réalisé ainsi qu'un chemin stratégique de 5 mètres de large relie ces deux points à Mont-Louis.