De quoi s'agit-il ?
Sant Esteve del Pedreguet est le nom de l'église paroissiale d'Ille-sur-Têt. C'est son nom catalan, mais en français on la nomme St Etienne. Le texte ci-dessous est en grande partie inspiré du fascicule que l'on y trouve, décrivant son histoire et son architecture.
Dédié à Saint Etienne, le premier diacre martyr condamné à être lapidé, l'église rappelle en de nombreux points son St Patron, à commencer par la niche située au dessus du portail d'entrée, réalisée en 1771 par Jean Joseph Chauvenet. La statue le présente sur le tas de pierres de son martyr dans une attitude théâtrale très à la mode à l'époque baroque. La réalisation de ce portail et de la façade monumentale, une des plus belles de ce département, vient achever un chantier de construction qui a débuté en 1664.
Pendant plus d'un siècle architectes, sculpteurs, tailleurs de pierres, menuisiers, ferroniers, peintres, maçons, journaliers et brassiers se succèderont pour donner à cette église ces dimensions de cathédrale. L'organisation du plan de l'édifice obéit au mouvement de réorganisation des lieux de culte impulsée par la Contre Réforme à la fin du XVIe siècle, une vaste nef qui permet à tous d'entendre correctement les sermons, une mise en valeur du maître autel, un soin particulier apporté aux chapelles du Saint Sacrement et du Rosaire, l'intégration des dévotions populaires locales et la dévotion aux principaux saints intercesseurs. La nouvelle église peut ainsi accueillir plus de 1500 personnes tout en permettant la mise en place d'une liturgie très théâtrale conforme à la Contre Réforme, notamment lors des processions.
Le financement des travaux ne fut pas des plus faciles étant donné les réalités économiques de l'époque et les guerres qui ont marqué ce département jusqu'au traité des Pyrénées en 1659, date à laquelle les comtés nord catalans sont assujettis à la couronne française. La communauté urbaine lève un impôt spécial "un tall" pour réunir les fonds nécessaires au commencement des travaux en 1664. La paroisse bénéficie également du produit des quêtes des différentes confréries de la ville, de legs testamentaires de particuliers et d'actions de mécénat de grandes familles bourgeoises de la ville.
Les artisans utilisent des matériaux locaux : les pierres d'angles et les arcs intérieurs sont en marbre de Bouleternère tandis que la façade et les piliers intérieurs sont en granit de Néfiach. Les retables à l'intérieur sont réalisés par des ateliers renommés de 1736 jusqu'au XXe siècle.
Plan de l'église
1. Chapelle de Nostra Senyora de l'Ajuda (Notre Dame du Bon Secours)
Retable de la fin du XIXe siècle avec une statue de la fin du XVIIIe siècle.
2. Chapelle de Ste Lucie
Retable de 1752 d'Antoine Martin Plassa. La Sainte est entourée de Ste Philomène et de St Féréol tandis qu'au sommet on découvre une très belle statue baroque de St Gaudérique, le Saint patron des laboureurs du Conflent, du Vallespir et du Roussillon.
3.Chapelle de St Joseph
Elle contient un retable de 1855, une statue réalisée par la fabrique des frères Virebent de Toulouse. Au dessus de la statue du Saint, un médaillon sculpté représente l'épisode de la fuite en Egypte. Sur les volets latéraux du retable on découvre les outils du charpentier et du menuisier. Le Saint est le protecteur de la corporation des menuisiers et des potiers de la ville d'Ille depuis la deuxième moitié du XVIIIe.
4.Chapelle de St Sébastien
Elle contient un retable en marbre de 1854. St Sébastien au centre du retable est entouré à gauche par St Maurice et à droite par St Roch. Le Saint titulaire du retable est le deuxième Saint patron de la ville tandis que St Maurice fait référence à l'ermitage de Saint Maurice de Greulera, cher à la dévotion populaire des illois et des gens du Ribéral. St Sébastien et St Roch sont deux Saints anti-pesteux, le retable fut d'ailleurs construits après une épidémie de choléra.
5. Chapelle du St Sacrement
Contient un retable de 1759 de Josep Navarra et Josep Cantayre. Le Christ ressuscité est entouré à gauche de St Jean-Baptiste et à droite de St Jean l'Evangéliste.
6. Retable du maître autel dédié à St Etienne
Le retable date de 1736, il a été réalisé par Josep Cantayre. Cette oeuvre illustre la mode du milieu du XVIIIe siècle, époque où les retables adoptent une allure plus classique. Les colonnes sont en marbre de Caunes, les statues, la gloire, sont en bois sculpté doré et peint. St Etienne et entouré par St Pierre et St Paul. Au sommet du baldaquin, la Trinité.
7. Chapelle de Nostra Senyora del Roser (Notre-Dame du Rosaire)
Contient un retable de la 2e moitié du XVIIIe siècle, fait par Antoine Domingo. Ce retable réintroduit des éléments plus anciens comme la Vierge centrale qui proviendrait d'un ancien retable autrefois dans l'église de la Rodona et un panneau sculpté représentant l'Annonciation du XVIIIe siècle. La Vierge est entourée par St Dominique et Sainte Catherine de Sienne, tous deux dominicains, ordre religieux qui contribua à la propagation de la dévotion du rosaire.
8. Chapelle de l'Immaculé Conception
Contient un retable de la fin du XVIIIe siècle. La statue semble plus ancienne que l'architecture du retable et pourrait avoir été réalisée au milieu du XVIIIe siècle. Cette chapelle reprend une tradition illoise plus ancienne d'un culte à Nostra Senyora de la Lluna.
9. Chapelle du Dévôt-Christ
Le retable du milieu est du XVIIIe siècle. Il s'apparente à la famille des retables du sculpteur Joseph Navarre. Dans la niche centrale organisée en baldaquin avec dais et rideaux rouges sont présentés la statue de Notre-Dame des Sept Douleurs et le Christ en Croix, au dessus de la gloire, St François d'Assise. La présence du St Franciscain renvoie à l'importance de cet ordre religieux à Ille au XVIIIe siècle. Le couvent l'Ermita est encore visible aujourd'hui à la sortie d'Ille direction Prades. sur le mur de la chapelle, la Creu dels Improperis (croix des outrages) qui récapitule de manière très pédagogique toutes les étapes du martyr du Christ. Cette croix ouvrait toutes les processions de la Sanche, le Jeudi Saint au soir.
10. Chapelle de St Antoine de Padoue
Le Saint est entouré de St François-Xavier à gauche et de St Martin, la statue de St Antoine semble dater du milieu du XVIIIe siècle. A remarquer sur le mur latéral gauche de la chapelle, une très belle toile peinte du 1er tiers du XVIIe siècle représentant les différentes scènes de la vie de St Antoine de Padoue avec leur intitulé en castillan. Cette toile provient probablement de l'ancien couvent franciscain de l'Ermita.
11. Chapelle de St Boniface
Il est commandé par le curé Bonet et imite le style des retables du XVIIe siècle. Les panneaux sculptés illustrent l'intervention de St Boniface pour sauver la population de la ville assiégée à la fin du XVIe siècle par les espagnols.
12. Chapelle de Notre-Dame de Lourdes et du St Sépulcre
Les statues et les peintures murales restaurées sont du XIXe siècle. La peinture derrière le St Sépulcre daterait du XVIIIe et présente au centre un médaillon avec les conformités de St François d'Assise. Cet élément provient d'un retable antérieur.
13. Les deux chaires à prêcher datent de 1774, elles ont été réalisées par Jean Chauvenet
14. L'orgue : Buffet d'orgue réalisé par le sculpteur Jacint Morato, sculpteur originaire de Vich, en Catalogne Sud. Il est construit à la manière de celui de la cathédrale de St Jean de Perpignan. Il est couronné au sommet par les armes de la ville d'Ille, sur les panneaux latéraux du buffet on peut voir le Roi David et St Cécile patronne des musiciens.