Histoire
Préhistoire et Antiquité
Comme la quasi-totalité des villages du Roussillon, Bages ne possède pas sur son territoire de preuves d'habitat préhistorique, que ce soit paléolithique (là, c'est normal) ou néolithique (il aurait pu y en avoir : Canet, par exemple, possède un champ d'urnes funéraires de cette époque).
Par la suite, les Ibéro-Ligures furent envahis par les Celtes (-500), eux-mêmes envahis par les Romains (-128), eux-mêmes envahis par les Wisigoths (408), eux-mêmes envahis par les Sarrasins (735), puis à nouveau envahis par les Francs (811). De cette longue succession d'envahissements, retenons essentiellement sa durée (près d'un millénaire et demi) et le fait que lorsqu'on parle d'envahissement, cela ne signifie pas forcément la guerre. S'il y a bien eu des batailles parfois, cela s'est quand même souvent passé sous la forme de colonisations « semi-pacifiques », les envahisseurs utilisant la force pour se faire accepter, avant de diluer les habitants dans la nouvelle civilisation dominatrice.
Moyen-Âge
Après l'arrivée des Carolingiens, la région s'est peuplée de pionniers venus du nord de la France. Elle s'est développée autour de nouvelles églises créées par les grandes abbayes fondées au cours du IXe et Xe siècles. Ainsi apparaît dans un document de 922 l'église de Bages, la première mention écrite du village.
Nous savons qu'il s'agissait d'un village de pêcheurs. Aussi curieux que cela paraisse, et malgré le fait qu'il ne soit pas en bord de mer, c'était le cas. Il faut dire qu'il y avait jusqu'au XIIe siècle un immense étang dont on peut toujours voir les formes en étudiant les courbes de niveau des abords du village. Il était poissonneux et les habitants vivaient bien de leur pêche.
La première mention certaine de l'église Saint-André date de 1093, sous le règne des comtes du Roussillon. Le XIe siècle correspond à l'avènement des classes supérieures typiques de la féodalité, les seigneurs, mais il faudra attendre le XIIe siècle pour que celle de Bages apparaisse. On trouve dans divers documents des traces de Guillem de Bages (1145), Beranger de Bages (1155) et Adémar de Bages (1171).
Le XIIe siècle est aussi celui des Templiers. Ce puissant ordre religieux avait des possessions un peu partout dans la région et se lança dans de grands travaux, en particulier d'assèchement. Il faut dire que la proximité du Mas Deu, siège de la commanderie locale, permettait de lancer plus facilement ces travaux. L'étang marécageux fut donc asséché, faisant disparaître à la fois le métier de pêcheur pour les habitants et une source de nourriture providentielle. Cette initiative entrait dans le plan d'assainissement général de la plaine du Roussillon que les membres de cet ordre avaient lancé, et globalement ce fut une parfaite réussite. Mais certains habitants en firent les frais, comme ceux de Bages. Le canal qui a servi au dessèchement est appelé de nos jours "l'Agulla de la mar" (l'Agouille de la mer, agulla étant une petite rivière en catalan), bien sûr il se jette dans la mer.
Par la suite, la paroisse de Bages fut récupérée par le comte d'Ampurias, mais sans qu'on sache vraiment quand ni pourquoi. Peut-être que la famille de Bages était déjà sous la coupe du comte, ce genre de seigneurie ayant été mis en place autour du XIe siècle. Toujours est-il que le 22 juin 1257, le comte vendit sa seigneurie de Bages à l’évêque d’Elne pour une somme de 5750 sous de Barcelone. Cette vente fut faite afin de payer la dot de sa fille Sibilla, qu'il mariait à Ramon, vicomte de Cardona. On peut se faire une idée de l'importance de Bages au XIIIe siècle par le chapitre d'Elne. Celui-ci était constitué de cinq dignitaires répartis dans le Roussillon : ils étaient à Elne, bien sûr, mais aussi à Saleilles, Trouillas, Baixas et à Bages. Ce fait, aussi insignifiant qu'il puisse paraître, est révélateur d'un village comptant sur la scène régionale.
Restée une possession de l'évêché, la paroisse de Bages fut transmise, là aussi sans savoir quand ni pourquoi, à la famille de Llupia. Il s'agissait à cette époque d'une famille tentaculaire, ayant un poids très important tant sur le plan politique que religieux (Hughet de Llupia en 1356, Ramon de Llupia en 1395, Gaspar de Llupia en 1420 furent tous seigneurs de Bages). Par la suite, Bages passa à diverses familles (Gaspar de Cagarriga en 1414, Ramon de Cagarriga en 1502, Joan Taqui en 1639, Mariana de Taqui épouse de Garau d’Om en 1669) avant de se transformer en commune à la Révolution française.
Peu après la Révolution française, en 1793, l'Espagne déclara la guerre à la France, et les troupes du général Ricardos envahirent la plaine du Roussillon. Cette dernière guerre avec l'Espagne ne laissa visiblement pas trop de traces dans le village, qui fut occupé très tôt. Pourtant, la ligne de front fut longtemps à peine un peu plus au nord, près de l'actuel Perpignan sud.