De quoi s'agit-il ?
Le palais des Rois de Majorque est un magnifique édifice du XIIIe siècle construit en plein Perpignan. Bien plus qu'un château, c'est un véritable palais qui fut construit à cette époque de scission de la Catalogne. Rappelons qu'au début du XIVe la Catalogne fut scindée en deux avec la création d'un ephémère royaume, le royaume de Majorque, dont la capitale continentale était Perpignan. Il était normal d'y construit un palais royal, c'est l'origine du palais.
Le palais a été construit selon le style gothique, caractérisé par des grandes arches. Les murs sont en galets de rivière et en briques liés au mortier, le tout enduit de chaux et peints. La pierre de taille a été largement utilisée pour tout ce qui est anguleux : Portes, fenêtres, angles des murs, escaliers, et surtout les tours. On choisit à l'époque un peu tout les marbres disponibles dans la région. (bleu, rose, rouge, blanc)
Les chapelles du rez-de-chaussée, fastueuses, indiquent tout le raffinement que ces rois portaient au monachisme franciscain. Elles se superposent pour s'élever en donjon féodal, si caractéristique de ce bâtiment.
Visite
Le plan de visite du Palais des rois de Majorque met l'accent sur quelques particularités du site.
L'entrée du palais est protégée par un fossé et une barbacane crénelée. La porte d'origine était percée du côté Sud de la tour de l'Hommage adossée à l'étage à la salle du trône.
En 1337, Jacques III publie les "Lois Palatines". Ce texte novateur, rédigé en latin et illustré de miniatures, décrit minutieusement l'organisation des services de la cour et la vie du palais. Il est conservé à Bruxelles (Bibliothèque royale Albert 1er)
Dans l'aile Sud, la Grande Salle, l'aula, de style gothique méridional, accueillait banquets, conseils royaux et parlements. Ses murs peints étaient tendus de tapisseries. Elle conserve sa cheminée près de laquelle un escalier communiquait avec les cuisines au rez-de-chaussée.
L'art de la table est raffiné à la cour. Aux XIIIe et XIVe siècle, véritable âge d'or, on écrit en Catalogne le "Sent sovi", premier recueil culinaire. Sucré-salé, aigre-doux, épices orientales donnent à cette cuisine des saveurs étonnantes. Le décor est au diapason : sol jonché de plantes aromatiques, nappes de draps blancs brodées, céramiques de "Manises", vaisselle d'or et d'argent,...
On accède à la chapelle haute, dédiée à la Sainte Croix, par une galerie. Sa façade en marbre s'orne d'un portail en plein cintre qui reçoit une porte de style mudéjar. A l'intérieur, les clefs-de-voûte et les culs-de-lampe sont ornés de saints et d'anges. Une frise inspirée de la calligraphie arabe court au-dessus de fausse tapisseries peintes. De part et d'autre du choeur, des trompes d'angle soutiennent de fausses baies. Des meurtrières protègent les vraies fenêtres.
Au dessous se trouve la chapelle Ste Madeleine prolongée par la sacristie. Ici, les saints et les anges sont remplacés par des fleurs, des feuilles et des fruits sculptés et peints. Le carrelage mudéjar, d'inspiration hispano-mauresque et la frise (grecque) donnent au décor un caractère méditerranéen. Les vitraux des chapelles ont été restaurés. On suppose que la chapelle haute était réservée au roi et aux grandes célébrations tandis que la chapelle basse servait à la reine.
Perpignan accueille de nombreux ordres religieux. Les Mercédaires, chargés du rachat des chrétiens captifs des maures, sont soutenus par le rois et les seigneurs. Les templiers, diplomates et gestionnaires, veillent sur le trésor royal jusqu'à la dissolution de l'ordre (1312). Les ordres mendiants, dominicains et franciscains surtout, sont très influents dans tous les milieux : leur idéal de pauvreté séduit les petites gens et les marchands délaissés par l'Eglise. Un profond élan de spiritualité franciscaine gagne la famille royale : le fils aîné de Jacques II renonce au trône et se fait moine franciscain au couvent de Perpignan.
La tour des chapelles domine les appartements royaux qui communiquent par un couloir. Le souverain logeait côté nord, son épouse côté Sud. La loggia de la cour de la reine conserve un superbe plafond. Jusqu'à la construction de la citadelle, un pré séparait la ville du palais, au-delà du fossé nord. A l'est se trouvaient une figueraie et une oliveraie. Au midi, un verger de treilles, d'orangers et de citronniers s'étendait entre le bâtiment et le rempart sud de la cité.
Dans les années 30, alors que les remparts de Perpignan étaient en pleine démolition, le palais des rois de Majorque avait encore ses fossés non remblayés. La photo ci-dessus montre comment était ce palais à cette époque.