De quoi s'agit-il ?
L'architecture de l'église paroissiale de Prats-de-Mollo est relativement sobre. Le bâtiment, d'assez grandes dimensions, présente une allure massive renforcée par la présence d’un clocher trapu, monolithique et lourdement proportionné.
La nef, unique, est divisée en cinq travées bordées de trois chapelles au sud et de quatre au nord. Ces chapelles sont des ajouts postérieurs, édifiés après le XVIe siècle. La dernière travée est occupée par une tribune datant de 1778. Son plafond, couvert de voûtes en croisée d’ogives, est légèrement plus récent que l’église elle-même : l’ancien s’était effondré en 1663 et dut être reconstruit. À l’ouest, se trouve la chapelle de la Pietat, construite en 1427. Elle était autrefois reliée à l’église par un porche, disparu depuis.
L’intérieur de l’église est particulièrement riche. De style baroque, il illustre un art foisonnant, marqué par l’abondance des dorures et la surcharge décorative. Ce style s’exprime pleinement dans les nombreux retables qui ornent les chapelles ainsi que dans l’ensemble du mobilier. Ces retables sont de précieux témoignages de la vie sociale et économique de Prats au XVIIe siècle : chaque confrérie ou corporation souhaitait disposer de son propre retable, léguant ainsi un véritable reflet des groupes professionnels et religieux de l’époque.
L’entrée principale se situe au sud. Le long de ce mur, trois chapelles se succèdent, de l’entrée vers le chœur :
- Retable Saint-Eloi et Saint-Joseph : Saint Éloi, patron des muletiers, occupe la place centrale ; Saint Joseph, patron des charpentiers, se trouve à gauche, tandis que Saint Jacques figure à droite. La partie basse illustre des épisodes de la vie de Saint Éloi, et la partie haute des scènes de la vie de Saint Jacques.
- Retable Sainte-Catherine : Consacré à Sainte Catherine d’Alexandrie, vierge martyre du IVe siècle, ce retable illustre sa vie dans la partie basse, tandis que la partie haute représente Sainte Anne.
- Retable du Rosaire : Dédié à Saint Pierre et Saint Paul, ce retable, daté de 1692, fut doré vers 1750 et restauré en 1892. Il met en valeur le culte de la Vierge.
Sur le mur nord, on trouve quatre chapelles, de la plus éloignée à la plus proche du maître-autel :
- Chapelle de la Pietat : Construite en 1427, elle est indépendante de la nef. Elle abrite un retable du XVIIe siècle consacré au Christ. Elle servit longtemps de salle de réunion à la confrérie de Saint-Michel, jusqu’au XVIIIe siècle.
- Chapelle Saint-Côme et Saint-Damien : Édifiée à la demande d’un particulier, elle est dédiée aux deux saints médecins, représentés avec un calice selon la tradition. Ils sont les patrons des médecins et des apothicaires.
- Chapelle Saint-Michel : Dédiée au patron des tisserands, cette chapelle fut édifiée en 1701 par la puissante confrérie locale. Une pierre gravée témoigne de cette profession avec des outils tels que navette, masse, force, peigne et carde. Le retable illustre le miracle du Mont Gargan ainsi que divers épisodes de la vie de Saint Michel, accompagnés de représentations de Saint Raphaël et d’un office religieux.
- Chapelle du Saint-Sacrement : Construite en 1675 grâce au financement de Jean de la Caze, gouverneur du fort Lagarde, elle abrite un retable érigé devant sa tombe.
Le retable du maître-autel
Le retable principal, consacré aux Saintes Juste et Ruffine, est l’élément majeur de l’église. Commandé par la confrérie des saintes en 1685 à Louis Généré, maître charpentier réputé, il fut doré soixante ans plus tard.
Le retable, structuré en cinq étages, développe une riche iconographie. Le premier étage illustre les scènes de la Passion du Christ : le jardin des Oliviers, la flagellation, le couronnement d’épines, le portement de croix. Le compartiment central abrite un tabernacle contenant un buste reliquaire du XIXe siècle. Le second étage met en scène les statues de Saint Pierre et Saint André (XIXe siècle) encadrant les Saintes Juste et Ruffine, avec le récit de leur jugement et du miracle du vin. Le troisième étage présente Saint Pallade et Saint Jean-Baptiste (XIXe siècle) ainsi qu’une Vierge Marie entourée de scènes du martyre des saintes. Le quatrième étage, réduit à trois compartiments, représente le corps de Sainte Juste jeté dans un puits, l’incinération de Sainte Ruffine après son supplice par les lions, et la crucifixion du Christ. Tout en haut, un aigle couronne l’ensemble.
L’orgue
L’orgue, typiquement d’inspiration espagnole, se reconnaît à sa statuaire et à la disposition horizontale de ses tuyaux. Œuvre de Salvator Quinta au XVIIIe siècle, il fut restauré une première fois après la Révolution, puis en 1932, à la suite d’un orage qui avait frappé l’église.
Le portail d’entrée
Le portail d’entrée, typique de la région, est constitué de lourdes poutres de bois renforcées par des ferrures forgées dans le Canigou, ici torsadées. La qualité du fer explique leur remarquable état de conservation. Le verrou de la porte est orné d’une petite tête de diable, motif symbolique fréquemment rencontré dans les églises du Vallespir.
La côte de baleine
Enfin, détail insolite : le porche de l’église abrite une véritable côte de baleine. Elle proviendrait d’un cétacé échoué à Saint-Cyprien à la fin du XIXe siècle. Si l’on ignore par quel chemin elle a été transportée jusqu’à Prats, une de ses vertèbres est toujours conservée au Muséum d’Histoire naturelle de Perpignan.