Histoire
La chapelle de Monserrat a été construite au début du XVIIe siècle, peut-être à la fin du XVIe. Ses matériaux de construction le prouvent, mais c'est surtout des références dans des documents écrits qui attestent de sa présence.>
Les plus anciennes mentions de la chapelle Notre-Dame de Montserrat à Estagel remontent au XVIIe siècle. En 1624, Anne Balle, épouse de Pierre Balle, lègue à la Vierge une mesure de blé et un quart d’huile, témoignage d’une première dévotion locale. Quelques décennies plus tard, en 1652, Pierre Aymerich prévoit dans son testament que des messes soient célébrées dans la chapelle, alors déjà dédiée à Notre-Dame de Montserrat.
La famille Aymerich apparaît à plusieurs reprises dans les archives. En 1678, un inventaire des possessions de l’hôpital Saint-Jean à Estagel mentionne un champ jouxtant la « Capella den Aymerich ». En 1682, Pierre-Antoine Aymerich cite explicitement l’église et l’autel de Notre-Dame de Montserrat, qui appartiennent à sa famille. Quelques jours plus tard, dans un codicille, il précise vouloir que des messes soient dites dans cette chapelle, voisine d’un champ lui appartenant. Après son décès, un inventaire décrit une terre dite « de la Capella », d’une contenance de quatre ayminades, située près des chemins de Latour et de Las Corbes, à proximité du ruisseau du Pla.
En 1684, le testament de Maria Llubes évoque à son tour la chapelle, « nouvellement édifiée dans le terme de la présente ville d’Estagel, au chemin de Latour ». Cela laisse penser que la construction actuelle date probablement de cette période. Quelques années plus tard, en 1693, Montserrat Lacostas, veuve d’Espira-de-l’Agly, demande que trois messes basses soient célébrées dans la chapelle estagelloise.
Au XVIIIe siècle, la chapelle reste liée à la famille Aymerich. En 1763, le mariage de Vincent Aymerich et de Catherine Jonquet y est célébré. Après le décès de Vincent, en 1785, l’inventaire mentionne encore « une pièce de terre dite de la Chapelle de Montserrat », contenant la chapelle elle-même, ses ornements liturgiques et ses modestes objets de culte : aube, chasubles, devant d’autel et armoire de sacristie.
Au XIXe siècle, Raymond Aymerich perpétue la tradition familiale : en 1853 puis en 1856, il lègue dans son testament une partie d’un champ appelé « La Chapelle », situé sur le territoire d’Estagel.
Au début du XXe siècle, la chapelle semble alors en déshérence. En mai 1914, le curé Matton sollicite du vicaire général l’autorisation de bénir la chapelle, d’y ériger un chemin de croix et de bénir deux ornements ainsi qu’un tabernacle. Dans une seconde lettre datée du 1er juin, il précise que la chapelle était abandonnée depuis longtemps : son prédécesseur en avait restauré les murs, une autre personne avait refait le pavage, la voûte et les enduits, et une famille de Thuir avait restitué la statue de la Vierge. Ces lettres témoignent d’une volonté de redonner vie à ce lieu de culte.
Une nouvelle bénédiction solennelle eut lieu en 1954 : la cloche de Notre-Dame de Montserrat, ainsi que celle de la chapelle Saint-Vincent, furent consacrées lors d’une grande fête présidée par l’évêque de Perpignan, événement relaté dans la Semaine diocésaine.
Enfin, en 1977, un préinventaire réalisé par Madame Pellicier indique que la chapelle actuelle, construite au XIXe siècle, a réutilisé des matériaux plus anciens. Elle ne présente pas d’intérêt archéologique particulier, mais conserve néanmoins quelques éléments notables : une gravure de Montserrat datant du XVIIIe siècle et une statue de la Vierge, probablement du XVIIe siècle, repeinte et surmontée d’une couronne rayonnante. Ces vestiges attestent d’une longue histoire de dévotion et de reconstruction autour de ce modeste sanctuaire estagellois.