De quoi s'agit-il ?
La Casa Xanxo est une maison datant du XVIe siècle située dans le vieux centre de Perpignan, rue de la Main de Fer. Historiquement, c'est un témoignage architectural de cette époque, mais au-delà de ça, elle abrite le Centre d'Interprétation de l'Architecture et du Patrimoine, un établissement ouvert au public qui explique comment a évolué l'architecture urbaine de Perpignan. C'est un service plutôt intéressant, mais hélas mal connu des Perpignanais eux-mêmes.
La Casa Xanxo
La Casa Xanxo est avant tout une belle maison de la rue de la Main de Fer, à Perpignan. C'est du côté du Campo-Santo, en direction de la place de la Révolution, une petite rue étroite qui, à priori, ne paie pas de mine. Mais en passant devant le bâtiment, on est interpellé par une magnifique frise en façade, une frise étrange, faite d'anges et de démons, ou du moins c'est ce qu'il paraît aux premiers abords.
La maison fut construite par Bernat Xanxo en 1508. Bernat Xanxo était négociant drapier – la confection de draps était une spécialité de Perpignan. Plutôt riche, il fut bourgeois honoré en 1510, marquant son passage dans la bourgeoisie aisée de Perpignan. Sa maison reflète son statut social en devenir, avec de grandes pièces et des entrepôts, une cave voûtée, etc. Différents aménagements eurent lieu au XVIIe siècle pour moderniser l'habitat, puis ensuite à intervalles réguliers jusqu'en 1942.
L'emplacement et la construction
L'emplacement de la maison n'est pas anodin. En effet, Bernat Xanxo était négociant en draperie, or les drapiers étaient dans le quartier de la loge (la rue des fabriques d'En Nabot en témoigne, par exemple). Il aurait été logique qu'il habite par-là, mais il a préféré s'établir près de la cathédrale Saint-Jean Baptiste. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il était le représentant de l'évêque, donc il était logique qu'il s'en rapproche géographiquement. Qui plus est, il diversifia son activité, faisant le négoce de pas mal d'autres types de biens, donc il ne se sentait pas obligé de rester près des drapiers.
Ainsi décida-t-il de construire sa maison rue de la Main de Fer.
Pour construire la Casa Xanxo, au début du XVIe siècle, il fallut détruire cinq maisons. La rue, plus étroite à l'époque, permettait d'accéder au bâtiment de réception, principal bâtiment de la maison. Elle avait trois niveaux et une cave, comme de nos jours.
La maison est construite en cayrous, le cayrous étant une brique cuite couramment utilisée dans les bâtiments du XVIe siècle. Les décors sont en roche calcaire de Las Fonts, un hameau de Calce, près de Baixas. Les pierres les plus prestigieuses viennent d'une carrière de Baixas.
Architecture de la maison
La Casa Xanxo s'ouvre sur un porche desservant deux pièces, l'une au nord, l'autre au sud. L'une d'elles avait une fonction assez rare pour l'époque. Il s'agit d'un vestibule dont les banquettes en marbre, le long du mur, ne laissent aucun doute sur le fait qu'il s'agissait d'une pièce permettant aux visiteurs d'attendre le maître de la maison. Rien que la présence d'une telle pièce marquait le statut social élevé du propriétaire.

La salle d'apparat
L'escalier est une construction plus tardive, datant du milieu du XIXe siècle. Auparavant, la cour était plus grande et le bâtiment deux fois plus étroit. Au premier étage, on trouve de nos jours deux pièces : une grande salle de réception et un salon. Là aussi, il s'agit d'une séparation du XIXe siècle, car initialement, le bâtiment n'avait qu'une grande pièce unique, vaste et fonctionnellement découpée en plusieurs secteurs utiles.
Le troisième niveau est le séchoir. C'est une grande pièce qui n'a pas évolué depuis sa construction. Elle servait de grenier à provision et permettait d'observer la rue discrètement. C'est une magnifique pièce à la charpente apparente.
Le style général de la maison est le gothique. Toutefois, c'est un gothique vivant, qui s'est adapté au fil du temps. Les corniches décorées ou la frise en façade sont typiquement gothiques, mais l'absence de fenêtres géminées au profit de fenêtres à linteau marque une certaine modernité.
La frise en façade

La frise
La frise représente une mise en garde contre les péchés dont tout bon chrétien devait s'affranchir. Elle est en deux parties. La partie gauche représente les péchés. Le lion symbolise l'orgueil, le changeur à sa table et sa chouette représentent l'avarice. La luxure et la gourmandise sont particulièrement réalistes... Sur la partie droite se trouve l'enfer. Une corde relie les deux parties, et l'on voit bien les diables de l'enfer tenter d'attirer les personnages de la partie gauche. Au centre, un crâne décharné représente le passage de la vie à la mort. Sous les parties détruites se trouvaient la plupart des scènes de châtiment. La frise se termine par un enterrement.
Les personnages sculptés sont des représentations de personnages fictifs. On y trouve quelqu'un coiffé d'une tiare, petit blasphème permettant de se moquer de la personne la plus influente de l'époque. Pour un représentant de l'évêque, cela ne manquait pas de sel. Sinon, il y a aussi quelques scènes scatologiques, des représentations courantes probablement tirées des contes populaires.
Cette frise est une belle allégorie sur la mise en garde des chrétiens envers leurs potentiels péchés... sous une forme parodique.