Guillaume de Cabestany était châtelain de Cabestany. Personnage réel, on le trouve en 1175 lors de la signature du testament de son père Arnau. Il a participé à la bataille Las Navas de Tolosa en 1212 contre les sarrasins.
Il était également poète, ses poésies étaient parfois écrites en occitan :
Aissi cum selh que baissa el fuelh,
E pren de les flors la gensor
(Comme celui qui courbe une branche,
et prends la plus belle fleur)
Epris de Saurimonde, femme de Raimond de Castell-Rossello, il la célébra dans ses vers et sut lui plaire. Le mari, transporté par la jalousie, emmena Guillaume loin du château et, l'ayant tué par trahison, lui arracha le cœur qu'il fit manger à son épouse.
Lorsqu'il eu révélé le secret à Saurimonde, celle-ci dit que "ce mets avait été si bon et si savoureux que jamais autre ne lui en tirerait le goût de la bouche". Le mari, en entendant cette réponse, courut chercher son épée. Saurimonde effrayée se précipita du haut de la tour de son château et périt dans la chute.
Le roi d'Aragon Alphonse II se rendit sur les lieux et ordonna d'arrêter le mari barbare. Il exigea d'ensevelir les deux victimes dans un même tombeau devant la porte de l'église Saint Jean, à Perpignan. Un service solennel fut institué pour le repos de leurs âmes, et il dura un temps où les chevaliers et les nobles dames de Catalogne, de Cerdagne, du Roussillon et du Narbonnais venaient y assister chaque année. Le roi fit mettre Raymond à mort dans sa prison et confisqua ses châteaux et ses terres pour les donner aux parents de Guillaume et de Saurimonde.
Voici un extrait d'une pièce de poésie que Guillaume adressa un jour à sa bien-aimée. Evidemment, la traduction est avec.
En sovinensa
Tenc la cara e'l doltz ris,
Vostra valensa,
E'l belh cors blanc e lis;
S'ieu per crezensa
Estes vas dieu tan fis,
Vius ses falhensa
Intrera en paradis.
............................
Doncx, cum seria
Qu'ieu merce no i trobles
Ab vos, amia,
La genser qu'anc nasques;
Qu'ieu nueg e dia,
De genolhs de pes
Sancta Maria
Prec Vostr'amor mi de;
Qu'ieu fui noyritz enfans
Per far vostres comans :
Et ja diens no m'enans,
S'ieu ja m'en vuelh estraire.
Franca res de bon aire,
Suffretz qu'ieu us bais los guans,
Que de l'als sui doptans
Guillems de Cabestanh
J'ai sans cesse présent à ma pensée votre figure,
votre doux sourire, votre corps beau, blanc et poli.
Si je m'occupais autant de Dieu,
si j'avais pour lui un attachement aussi pur,
sans doute avant la mort même j'entrerai au paradis...
Se peut-il que j'obtienne de vous aucun merci,
chère amie, ô la plus aimable des femmes,
moi qui nuit et jour, à genoux ou debout,
supplie la Vierge Marie de vous inspirer quelques tendresses pour moi.
Enfant, je fus élevé auprès de vous;
je fus destiné à exécuter vos commandements et,
que Dieu ne me favorise jamais, si j'ambitionne un autre sort.
Permettez que j'imprime un baiser sur ces gants qui couvrent vos belles mains.
Je suis si timide que je n'ose demander une plus grande faveur.
Guillaume, seigneur de Cabestany